dimanche 23 mars 2014

1) Approche polanyienne du problème central de l'histoire sociale des temps modernes. Son traitement libéral

Dernière mise à jour, le 14-06-2019.

-Formulation du problème
 Le problème inédit que pose le développement d'une société de marché, sur une échelle jusque là inconnue dans l'histoire humaine, est celui que nous avons à affronter aujourd'hui pour penser sa crise et la façon dont on peut espérer en voir l'issue. Nous sommes ici à la croisée des chemins. L'alternative est la suivante. Soit, radicaliser le principe de l'économie de marché; cette solution postule que toutes les difficultés que nous rencontrons aujourd'hui viendraient d'obstacles divers empêchant le marché de produire ses effets supposés vertueux; c’est la position ultra majoritaire des élites aux commandes des affaires du monde. Soit, soutenir, comme le faisait déjà Polanyi pour penser la grande crise des années 1930, qui a conduit à l'avènement du fascisme un peu partout en Europe, que le principe même d’une société organisée sur la base d’un marché auto régulateur et créateur de prix prétendant intégrer les facteurs de production nécessaires à la subsistance humaine que sont la terre, le travail, la monnaie, et, aujourd'hui, la connaissance, est une impossibilité, et pire, une "utopie destructrice".

Une "utopie" d'abord, en ce  sens  qu'il s'agit de quelque chose qui n'existerait nulle part. D'après les théories libérales, le marché est censé s'auto réguler, fonctionner tout seul sans que les Etats n'aient à intervenir; sauf qu'en pratique cela ne marcherait pas. On l' encore vu lors de la grande crise financière de 2008. Dans un premier temps, les libéraux purs et durs préconisaient de laisser le marché s'auto réguler et trouver lui-même les solutions à la crise... en vain. Il a fallu que les Etats interviennent massivement pour renflouer les banques et leur éviter la faillite avant que tout le système ne s'effondre. "Destructrice" ensuite, et ce, en deux sens au moins. Destructrice des liens sociaux ce qui devrait conduire, à terme, à la décomposition de la société toute entière. Ecologiquement ensuite, cette utopie devrait conduire à la dévastation de la nature ce qui nous renvoie aux trois aspects les plus critiques de la crise écologique actuelle: tellurique ( l'épuisement des sols), atmosphérique (le réchauffement climatique) et biologique (l'effondrement de la biodiversité). C'est ainsi conjointement, l'être humain et la nature qui seraient attaqués en leur coeur en prétendant en faire de simples marchandises:"[...] abandonner le destin du sol et des hommes au marché équivaudrait à les anéantir." (Polanyi, La grande transformation, p. 194) Si l'on admet cela, il reste à trouver une façon non oppressive pour les libertés individuelles de réencastrer l’économie dans la société. Tel est problème: soit, il s'agit d'un projet de société qui doit assurer la prospérité des nations et favoriser le bien-être du plus grand nombre ou bien il s'agit d'une entreprise chimérique qui doit conduire le monde à sa ruine:"La question de savoir laquelle de ces deux positions est la bonne est peut-être le problème le plus important de l’histoire sociale récente, puisqu’il n’implique pas moins qu’une décision sur la prétention du libéralisme économique à être le principe organisateur fondamental de la société." (ibid., p. 207)

-Traitement du problème par la politique libérale: la radicalisation de l'économie de marché.
Pour l'idéologie dominante qui tend toujours, dans toute société hiérarchisée en classes, à être celle de la classe dominante (1), la solution à la crise est une radicalisation des principes de l'économie de marché trouvant son remède dans des "traitements de choc" comme ceux infligés aux pays les plus gravement touchés comme la Grèce. La crise actuelle, à  suivre cette ligne de pensée, viendrait de diverses interférences, en particulier, d’interventions étatiques mal venus qui empêchent le mécanisme auto régulateur du marché de produire ses effets vertueux:"[...] l'offensive néolibérale s'appuie sur l'hypothèse selon laquelle le potentiel de l'économie de marché est entravé par un ensemble de règles paralysantes." (Caillé et Laville. Postface à Polanyi, Essais, p. 580).  Une des principales sources d'inspiration de cette approche libérale de la crise, c'est la fameuse proposition d'Adam Smith de la "main invisible" du marché censée harmoniser les atomes d'égoïsme constituant la société. C'est en laissant chacun poursuivre ses intérêts propres, maximiser ses gains, qu'il doit en résulter une situation de prospérité générale qui n'est, à proprement parler, voulue par personne et qui profitera pourtant à tous. L'homo oeconomicus, l'égoïste calculateur de l'économie de marché," ne pense qu'à son propre gain ; en cela [...], il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler"(A. Smith, Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations, livre IV, ch. 2, 1776) Autrement dit, attendre des individus qu'ils agissent par altruisme et dévouement pour le bien de la société serait contre productif. Si les individus agissent avant tout dans leurs propres intérêts personnels alors les contraindre à agir pour l'intérêt des autres le conduirait à ne plus rien faire. L'égoïsme censé être inscrit au plus profond de la nature humaine rendrait utopique toute autre forme d'intégration  économique qui n'en tiendrait pas compte. Il faut prendre les hommes tels qu'ils sont, des égoïstes calculateurs, et non pas bâtir des théories sur un idéal d'humanité chimérique. Le mécanisme autorégulateur du marché, "la main invisible" est censée harmoniser automatiquement les intérêts des uns et des autres pour assurer la prospérité générale des nations; elle est censée être le seul  multiplicateur efficient de leur richesse.
Il n'en reste pas moins que cette présentation de la pensée de Smith est beaucoup trop réductrice et simplificatrice. C'est pourtant ce qu'on a, en général, retenu de lui, que ce soient les libéraux ou leurs critiques. Or, si on veut avoir une vue d'ensemble de son oeuvre, il faut prendre en compte un autre de ses ouvrages fondamentaux, beaucoup moins connu cependant, sa Théorie des sentiments moraux, dans lequel il donne à ce qu'il appelle la "sympathie", une place absolument centrale dans la vie sociale, qui fait qu'il est, en réalité, très loin d'une morale du pur égoïsme, tout comme d'ailleurs un autre philosophe de la même période, écossais celui-là, D. Hume. Ce qui va  dans ce sens, à l'encontre du prétendu réalisme qu'invoquent les doctrines libérales, ce sont aussi les précieux acquis de l'anthropologie que nous avons fourni, qui montrent que primitivement, l'être humain est tout le contraire d'un animal égoïste. Le libéralisme actuel, sous la forme totalement débridée qu'il prend, ce  qu'on a l'habitude d'appeler le "néolibéralisme",  a bien d'avantage de filiation avec un autre auteur libéral de l'époque de Smith, Mandeville. Pour le coup, ce dernier soutient une morale du pur égoïsme censé être au fondement de la prospérité des sociétés humaines, suivant la formule en sous-titre du texte où cette conception est exposée, La fable des abeille: "les vices privés font le bien public", ou, comme il le prétend encore, "chaque partie étant pleine de vice, le tout était cependant un paradis." ( cité par Sahlins dans La découverte du vrai sauvage, p. 376) Voir cette petite vidéo qui remet les choses à leur place et évite de faire dire à Smith le contraire de ce qu'il a voulu exprimer:

C'est donc chez quelqu'un comme Mandeville, bien plus que chez Smith, qu'il faut chercher les sources du libéralisme actuel. Et, il faut bien se rendre compte que Mandeville, à son époque, à la charnière des XVII et XVIIIème siècles, apparaissait comme quelqu'un de tout à fait scandaleux pour les autorités politico-religieuses, ce qui lui valut même de voir ses livres brûlés en place publique, tellement ils horrifiaient. La leçon de sa fameuse Fable des abeilles se résumait ainsi par ce précepte fondamental d'économie politique: si vous voulez favoriser la prospérité des nations, fermez les couvents et ouvrez des maisons de prostitution; ces dernières génèreront effectivement bien d'avantage d'activités économiques, ce qu'on appelerait, en termes actuels, un gonflement du PIB, ou encore, autrement dit, de la sacro-sainte croissance que le président N. Sarkozy était près à aller chercher "avec ses dents", pour reprendre ses propres termes. Le philosophe D. R. Dufour s'est livré à une éxégèse de l'oeuvre de Mandeville, pour plus de détails sur ce fondateur ô combien sulfureux mais instructif de l'économie politique moderne:

En réalité, à bien y réfléchir, Smith a peut être autant d'affinités avec la pensée d'un socialisme de liberté qu'avec le libéralisme actuel. Mais, ce n'est pas ce que la tradition libérale ultérieure a retenu de lui, mais une morale du pur égoïsme d'où découle la légitimation d'une politique du "laisser-faire". Si la société de marché fonctionne si mal, diront les libéraux, c'est, en particulier, parce que le principe  redistributif des Etats intervient beaucoup trop dans l'économie et empêche la "main invisible" du marché de produire ses effets vertueux. En prélevant une part considérable de la richesse, il dérégule le mécanisme offre-demande-prix du marché et décourage l'investissement productif. C’était déjà le thème libéral , à la fin du XIXème siècle, d’une conspiration anti libérale conduite au nom de toutes sortes d’intérêts corporatistes comme ceux des syndicats ou des cartels monopolistes qui empêcheraient le mécanisme du marché  de produire son œuvre bienfaisante: "La racine de tout le mal, affirment avec insistance les libéraux, se trouve précisément  dans cette ingérence dans la liberté de l’emploi, du marché et de la monnaie pratiquée par les différentes écoles du protectionnisme social, national et monopoliste depuis le troisième quart du XIXème siècle […] l’initiative généreuse de nos ancêtres a été contrecarrée par les passions du nationalisme et de l’antagonisme de classes, des intérêts établis et, par-dessus tout, par l’aveuglement des travailleurs, qui n’ont pas su voir qu’une complète liberté économique était en fin de compte bénéfique à tous les intérêts humains, y compris les leurs." ( Polanyi, La grande transformation, pp. 210-211) C'est pourquoi les économistes libéraux du XIXème siècle prétendaient expliquer la misère ouvrière par les entraves faites au mécanisme du marché auto régulateur offre-demande-prix et demandaient déjà à radicaliser son principe pour venir à bout des maux de la société moderne:"Les économistes libéraux renversent la critique, montrant que l'existence encore fortes d'entraves à la concurrence explique la pauvreté ouvrière. Une réorganisation de la société aggraverait la situation en donnant aux catégories sociales pauvres l'assurance que la société leur doit assistance." ( Ferraton, Associations et coopératives, p. 31)
Nous en sommes revenus à ce point aujourd'hui avec la gestion libérale de la crise de l'Etat-providence. Raison pour laquelle, la crise actuelle du libéralisme ne pourrait se résoudre que par une radicalisation des principes même du libéralisme:"Certains font confiance aux élites, aux aristocraties, au managérialisme et aux grandes firmes. Ils sont convaincus que toute la société devrait s'adapter de façon plus étroite au système économique en place, qu'ils désirent maintenir en l'état. C'est l'idéal du Brave New World (roman d'A. Huxley traduit en français sous le titre, Le meilleur des mondes) dans lequel l'individu est conditionné pour soutenir un ordre établi pour lui par ceux qui sont plus sages que lui-même." (Polanyi, Essais, pp. 518-519) La solution promue par les tenants de l’orthodoxie du néo libéralisme pour sortir de la crise actuelle est dans le prolongement direct de cette ligne de pensée: "Elle consiste à panser immédiatement les plaies de la finance par un endettement accru des Etats, suivi d’une forte cure d’austérité publique et salariale accompagnée de la recherche effrénée d’un nouveau potentiel de croissance « verte ». Il s’agit d’accentuer encore le mouvement de la marchandisation. C’est la voie libérale. Celle de l’OCDE, de la Commission européenne, et de la plupart des gouvernements, à quelques nuances près entre les conservateurs et les sociaux-démocrates." ( N. Postel et R. Sobel, Crise de la pensée et pensée de la crise dans Socio économie et démocratie, L’actualité de Polanyi, p. 120) Suivant cette ligne de conduite, "accentuer encore le mouvement de marchandisation" revient à radicaliser le processus d'intégration des constituants fondamentaux de la vie humaine dans le marché autorégulateur offre-demande-prix. Il sera exploré ici dans ses trois dimensions fondamentales touchant les facteurs de production que sont, le travail, la terre et la connaissance. (ici encore, il y aurait lieu d'y rajouter la question aussi importante de la monnaie)

-La radicalisation de la marchandisation du travail  
 Dans le traitement libéral de la crise, la protection sociale qu’apporte l’Etat est ruineuse, en particulier, touchant les allocations chômage car elle ne fait que perturber le mécanisme auto régulateur régi par la loi de l’offre et la demande de travail en désincitant les individus à aller louer leur force de travail; c’est le thème de droite rabâché sous toutes les coutures, de nos jours, sous sa forme populiste, de ces parasites, particulièrement venant de l’immigration, qui vivent de l’aide sociale et enfoncent le pays dans la crise. C’est pourquoi un ultra libéral comme Mises ne craignait pas de pousser jusqu’au bout de sa logique l’idéal d’une société entièrement  organisée sur la base d'un marché auto régulateur intégrant le travail à titre de pure et simple marchandise en militant pour une suppression complète de toute forme d’allocation chômage: "tant qu’on verse des allocations de chômage, le chômage doit exister […] l’assistance aux chômeurs s’est révélée l’une des armes de destruction les plus efficaces." (cité par Polanyi, La grande transformation, p. 388) Le credo libéral, à l’état chimiquement pur se formule ainsi: "Pas de salaires fixés, ni de secours pour les chômeurs valides, mais pas non plus de salaires minimaux, ni rien qui garantisse le « droit de vivre ». Il faut traiter le travail comme ce qu’il est, une marchandise qui doit trouver son prix sur le marché." (ibid., p. 177) C'est pourquoi  Polanyi situait le véritable acte de naissance du capitalisme moderne en 1834 en Angleterre avec l’abolition de la loi de Speenhamland; c’est une date qui marque  la naissance véritable d’un marché du travail après celui de la terre et de la monnaie. Cette loi constituait le dernier verrou à faire sauter pour le constituer et faire du travail une marchandise parmi d'autres censée trouver son prix (le salaire) sur le marché par le mécanisme offre-demande. Jusque là, la loi de Speenhamland instituée en 1795 dans une situation de grande détresse pour le petit peuple, ancêtre de la sécurité sociale,  qui garantissait un revenu minimum aux pauvres indexé sur le prix du pain, l'empêchait. Seul l’aiguillon de la faim pouvait les contraindre à aller louer leur force de travail sur le marché. La peur de la faim et l'espoir du profit constituent dans le cadre de ce projet d'économie politique, les deux stimulants essentiels censés ajuster les motivations individuelles à la société de marché  pour la rendre efficiente. La protection sociale qu'apportait Speenhamland empêchait un tel ajustement. Elle  interférait avec le projet économique de la constitution d’un marché du travail.  Elle eut, en réalité, un double effet pervers: les capitalistes l’exploitèrent comme une forme de subvention de la puissance publique pour alléger artificiellement le coût du travail et verser des salaires de misère tandis qu’elle désincitait les pauvres à aller louer leur force de travail et les emmurait dans leur condition d’assistés sociaux. C'est la tragédie d'un  régime social qui est tel que toute forme de politique  d'aide aux pauvres menace l'économie de la société:"Inévitablement, la société prit des mesures pour se protéger, mais toutes ces mesures, quelles qu'elles fussent, compromirent l'autorégulation du marché, désorganisèrent la vie industrielle, et exposèrent ainsi la société à d'autres dangers." (ibid., p. 38) Soyons prudents. Nous touchons peut-être ici le fond du problème que pose l'institution d'une société de marché: elle s'édifie sur la base d'une séparation entre la sphère économique et la sphère politique telle qu'il en  résulte un conflit entre les deux qui  risque de s'avérer catastrophique pour l'unité de la société. Mais, il nous faut encore parcourir un certain chemin avant de pouvoir aborder sérieusement ce qui pourrait être le noeud du problème que pose l'institution d'une société de marché.
Quoiqu'il en soit, on peut comprendre, partant de là, pourquoi le salariat au XIXème siècle, quand il a commencé à se généraliser, a pu être tenu comme quelque chose de pire encore, par certains côtés, que l'esclavage. C'est, par exemple, ce que les Sudistes esclavagistes objectaient aux Nordistes abolitionnistes dans les années 1860 lors de la Guerre de Sécession aux Etats-Unis: nous, nos esclaves nous appartiennent; nous tâchons donc de prendre soin de notre "marchandise" pour ne pas dévaloriser notre capital humain. Vous, les Nordistes, quand vous n'avez plus besoin d'un salarié vous le licenciez et il se retrouve dans la rue à mourir de faim. L'esclave, s'il était totalement privé de liberté bénéficiait, en retour, d'une protection matérielle qui le mettait à l'abri de connaître les affres de la faim. Ce n'est plus le cas pour le salarié. C'est ce qui rend raison du fait que pour un des fondateurs du syndicalisme révolutionnaire en France à la fin du XIXème siècle, E. Pouget, le salariat était perçu comme pire, d'un certain point de vue, que les anciennes formes de domination qu'il a remplacé:"Ainsi est-on amené à conclure qu'entre l'existence précaire du salarié moderne et celle de l'esclave du monde antique ou des serfs du Moyen Age il n'y a pas de différence essentielle [...]Même, par certains côtés, son sort est plus aléatoire que celui de l'esclave antique: la valeur marchande de ce dernier le faisait apprécier du propriétaire, qui avait intérêt à conserver sa "marchandise" en bon état, pour en éviter la dépréciation. De nos jours, le capitaliste n'est plus propriétaire du travailleur, il se borne à le louer; de la sorte, la responsabilité de l'exploiteur est réduite au minimum..." (E. Pouget, L'action directe et  autres écrits syndicalistes, pp. 86-87)
Il reste à apporter une précision importante touchant la radicalisation de la marchandisation du travail. On trouve dans certains programmes politiques ultra libéraux quelque chose qui ressemble à l'idée d'un revenu inconditionnel. Mais, il faut bien prendre garde de ne pas confondre chien et loup. Le documentaire de D. Häni et Henno Schmidt sur le revenu de base  précise bien les conditions à partir desquelles il est possible de dénaturer cette mesure pour l'intégrer à la gestion ultra libérale de la crise actuelle par une marchandisation accrue du travail. Dans cette logique, il s'agit d'un mécanisme institutionnel censé garantir à la fois une flexibilité maximale du travailleur, un maximum de souplesse pour pouvoir le licencier ou le réembaucher à tout moment, une pression à la baisse sur les salaires et une liquidation  de l'Etat social, c'est-à-dire du principe redistributif sous forme d'allocation maladie, retraites, congés parentaux etc. C'est ce que l'économiste américain M. Friedman, une des figures emblématiques de l'ultra libéralisme actuel, préconisait sous la forme d'"un impôt négatif":"Dans la logique libérale, la protection sociale est destinée à permettre la mobilité des travailleurs et à couvrir les chômeurs, exclus, inemployables, afin d'assurer l'existence d'un marché du travail "libre", sans entrave.  Dans cette optique, l'impôt négatif comme complément des revenus des salariés pauvres est un palliatif à un travail sous évalué par le marché (qui a toujours raison). Mieux qu'un palliatif, c'est même ce qui doit permettre au travail d'être sous-évalué (en dessous du coût de reproduction du travailleur)." (extrait de Jean Zin, B. Friot, Et la cotisation sociale créera l'emploi) Voyez à 16' dans le documentaire de Hani et Schmidt, les trois conditions à partir desquelles on peut dénaturer le revenu inconditionnel pour l'intégrer dans une politique ultralibérale de marchandisation accrue du travail:
-" en fixant un montant trop bas". Un étalon (qui vaut ce qu'il vaut et qui peut donc être discuté) pour juger de la valeur du montant, c'est le seuil de pauvreté tel qu'il qu'il est fixé en France autour de 950 euros par mois.
-"en supprimant en même temps toutes les prestations sociales"; les allocations maladie, familiale etc. Dans ce cadre, il s'agit d'une mesure qui vise à alléger au maximum l'état social et qui revient à réduire les droits de tous.
-"en le soumettant quand même à des conditions". Le caractère inconditionnel du revenu est absolument fondamental. Il garantit son intégration à une logique de don et non d'échange.
 L" idée d'un revenu inconditionnel a donc ses versions aussi bien dans la droite ultra libérale que dans la gauche radicale. C'est pourquoi, il faut toujours prendre grand soin, de déterminer à quelle version on a à faire; soit celle qui s'inscrit dans un projet libéral de radicalisation du marché du travail, soit dans un projet qui donne aux gens la possibilité de s'en émanciper  (voir dans cette optique cet article de l'économiste J. Gadrey, Ce que la Finlande va expérimenter n'a rien à voir avec le revenu-universel). Faute de faire cette distinction élémentaire, on trouve bon nombre de gens à gauche qui rejettent radicalement cette mesure au nom de la lutte contre le capitalisme.

-La radicalisation du mouvement d'enclosure de la terre 
La terre, comme le dit Polanyi, est une partie essentielle de ce que nous désignons par "la nature". Une chose de la plus haute importance qui est passée quasi inaperçue, c'est que durant l'après-guerre, dans la période keynesienne où les Etats menaient une politique de protection sociale touchant le travail (généralisation de la Sécurité Sociale) et la monnaie (réglementation des marchés financiers), ils ont laissé complètement de côté la question de la marchandisation de la nature qui a pu se poursuivre souterrainement de plus belle. Pendant la période des Trente Glorieuses, "le capitalisme se réencastre à partir d'"une véritable mise à distance du marché, de la monnaie et du travail [...] ce réencastrement ne concerne pas la troisième et sans doute la plus fondamentale des marchandises fictives, l'environnement. Durant cette période, ce dernier reste une dimension de la société entièrement soumise aux impératifs marchands." ( Postel et Sobel, Crise de la pensée pensée de la crise dans, Socioéconomie et démocratie, l'actualité de Polanyi, p. 115). L'absence de toute politique de protection  dans ce domaine a constitué une brèche béante dans laquelle les organisations du marché ont pu s'engouffrer pour radicaliser le mouvement des enclosures de la terre. Ce qu'il s'agit désormais de clôturer va très loin; ce ne sont plus seulement des parcelles de terre, comme ce fût le cas à partir de la fin du XVème siècle en Angleterre, mais l'ensemble des constituants de la nature comme l'eau, les espèces vivantes, les graines, les séquences de gènes, les bactéries, les éco-systèmes,  etc. Voir, pour un bon aperçu,  le documentaire de C. Polinquin, Le bien commun: l'assaut final. Ce qui était autrefois un bien commun qui n'appartenait à personne,et, auquel, pour cette raison, tout le monde pouvait avoir accès librement, sans avoir à payer pour cela, est traité désormais comme une marchandise que certains peuvent s'approprier pour eux-mêmes en faisant payer les autres pour y avoir accès. Pour le cas particulier  de l'eau potable allant jusqu'à l'exemple extrême d'une tentative de privatisation de  l'eau de pluie en Bolivie, se reporter au documentaire tiré de l'oeuvre de J. Bakan, The corporation, Programme de développement, à partir d'1 heure 40' 35". C'est aussi toute la bataille juridique qui tourne aujourd'hui autour du brevetage du vivant et dont le coup d'envoi a été donné par l'affaire  Chakrabarty en 1972: la firme américaine General Electric "dépose une demande de brevet sur un microorganisme génétiquement modifié et capable d’absorber certaines pollutions marines." (F. Latrive, Du bon usage de la piraterie, p. 34; très bon ouvrage en libre accès pour une introduction à la question de la radicalisation de la société de marché touchant la nature et la connaissance)  L'arrêt rendu par la Cour Suprême des Etats Unis en 1980 qui donnait raison à General Electric  a marqué une étape décisive dans le mouvement d'enclosure de la nature. En son nom, des centaines de brevets ont pu être déposés; un exemple parmi tant d'autres: en 1986, l' Américain L. Miller obtient un brevet sur une espèce de plante qu'il prétend avoir découvert,  à partir de laquelle, depuis des temps immémoriaux des tribus indiennes de la forêt amazonienne fabriquaient leur boisson sacrée, l'Ayahuasca, qu'ils utilisent dans leur rituel magico religieux. Leur pratique est devenue illégale et viole "le droit sacré" de la propriété privée. Peut-on s'approprier des espèces vivantes et en faire la ,propriété privée d'entreprises à but lucratif? Toute la question se joue autour de la distinction entre innovation et découverte et de savoir, à partir de là, jusqu'où le brevetage peut aller. Relève de l'innovation, l'artifice humain, ce que l'homme invente; relève de la découverte ce qui est l'oeuvre de la nature et qui préexiste à l'existence de l'homme. Dans l'affaire Chakrabarty, l'argument mis en avant par la Cour suprême pour justifier le brevetage du vivant implique  de brouiller complètement la distinction entre innovation et  découverte; dans les termes de l'arrêt de Cour Suprême des Etats Unis, de considérer que toute découverte implique un élément d'innovation qui rend son appropriation privative légitime: "le vivant n’est plus considéré comme produit de la nature dès lors qu’il nécessite l’intervention de l’homme pour être mis au jour." (cité par Latrive, P. 34)   Il en va ainsi du génome humain; certes il ne relève pas de l'artifice humain; il est une donnée de la nature qui préexiste au pouvoir humain de fabrication; mais, pour être découvert, il fait appel à de l'innovation, à l'invention de techniques; dans cette mesure, les laboratoires de recherche des grandes entreprises de la biotechnologie peuvent prétendre s'approprier des séquences de ce génome. Une telle radicalisation de l'enclosure de la nature constitue pour la société une menace sans précédent qui l'oblige envers et contre tout à poser la question des limites qu'il faut déterminer  à un tel processus. C'est bien le sens du nouvel arrêt qui a été rendu par la Cour suprême des Etats Unis en juillet 2013 l'obligeant à faire marche arrière par rapport au jugement qui avait été rendu lors de l'affaire Chakrabarty:" la Cour suprême des Etats-Unis [...] vient de rendre un jugement historique en assimilant l'isolation des gènes à un processus de découverte et non d'invention." (Le Monde, La cour suprême libère les gènes) Le combat pour ou contre la radicalisation de l'économie de marché touchant la nature se mène actuellement sur ce genre de ligne de front .

L'autre volet de la radicalisation de l'enclosure de la nature met en jeu  la question de la crise environnementale dans un de ses aspects les plus critiques que sont les  rejets de G.E.S. (Gaz à Effet de Serre) fortement corrélés avec le réchauffement climatique et l'épuisement de la biodiversité. La constitution d'un marché du carbone et de la biodiversité, en pleine expansion, où s'achètent et se vendent des droits de polluer et de nuire, est, ici aussi, l'alpha et l'oméga de toute politique libérale de gestion de la crise; ce qui se développe aujourd'hui sous le label de "capitalisme vert". Là encore la main invisible du marché est censée avoir réponse à tous les problèmes: "En échangeant des permis ( de polluer), les acteurs satisfont de manière collective à l'objectif global d'émission (de gaz à effet de serre). Si le marché fonctionne parfaitement, on aboutit à une égalisation des coûts..." (Brahic et Salles cité par S. Juan dans La transition écologique, p. 82) Le hic, c'est qu'il est extrêmement problématique de prétendre monétariser des services gratuits que rend la nature,  en les intégrant dans un marché régi par l'offre et la demande, et parmi les innombrables, celui d'un climat permettant la viabilité de la vie humaine sur terre. On rentre ici dans des calculs et des modèles complexifiés jusqu'à la démesure, qui n'ont au fond d'autre perspective fondamentale que "de justifier une prolongation de la logique productiviste mondial et une continuation des dégradations environnementales globales, d'autant plus que la valeur de la tonne de carbone émise baissera avec l'élargissement du marché à l'ensemble des pays les pauvres qui auraient intérêt à acheter des droits de polluer." (S. Juan, La transition écologique, p. 82-83) Factuellement, les données scientifiques ne laissent planer aucun doute quant à l'efficacité de cette sophistication des modèles économiques; les émissions de GES ne cessent de continuer à augmenter à l'échelle globale. Pour les données précises, voir, par exemple cette conférence de J. M. Jancovici, dans cette conférence donnée à l'Ecole centrale Nantes, de 2 h 12' 30 à 2 h 13' 45:


-L'enclenchement du deuxième grand mouvement des enclosures du patrimoine immatériel de l'humanité
 Aujourd'hui, dans l'économie mondiale, la valeur d'échange des marchandises autour de laquelle se fixe leur prix,  incorpore de plus en plus de travail qui relève de l'immatériel et de moins en moins de la production de l'objet matériel en tant que tel. Donnons quelques exemples pour y voir clair. Une paire Nike Air Pegasus coûte environs 16 dollars à Nike en matières premières et en main d'oeuvre pour la produire en tant qu'objet matériel:" La même paire sera vendue 32 dollars aux distributeurs chargés de l’écouler en Europe et aux ÉtatsUnis, une fois ajoutés la publicité, les dépenses de recherche et développement, les études marketing, les frais de gestion, etc. "Une Nike coûte aussi cher à produire comme objet social que comme objet physique", résume l’économiste Daniel Cohen. La valeur des produits se situe de plus en plus dans l’innovation, le marketing, la symbolique ou la créativité, et de moins en moins dans la fabrication."( F. Latrive, Du bon usage de la piraterie, p. 75) Ou encore, un C.D. ne coûte que quelques dizaines de centimes d'euros à être reproduit matériellement alors qu'il sera vendu entre quinze et vingt euros. Un cas plus dramatique est celui de l'industrie pharmaceutique; les  médicaments comme ceux qui permettent de soigner le S.I.D.A. ne coûtent pas grand chose à être produits comme objet matériel. Le coût exorbitant qui les rend inaccessible aux pays les plus pauvres incorpore le travail immatériel de recherche techno scientifique, de marketing, d'études de marché, de publicité, de social business (voir dans les formes laïcisées du don injurieux, 3c du sujet, Quelque chose peut-il valoir qu'on donne sa vie? pour des développements sur le sens de ce terme; le leader mondial de l'industrie pharmaceutique Pfizer en est le parfait exemple: voir à 1 h. 14' 55" dans le documentaire The corporation inspiré de l'ouvrage de J. Bakan) etc., dans lesquels l'industrie pharmaceutique investit et au nom desquels elle incite par du lobbying le législateur à voter des droits de propriété intellectuelle pour se rentabiliser.
On comprend aussi pourquoi l'école doit s'ajuster à cette nouvelle donne d'une économie qui est de plus en plus amenée à se développer dans la sphère de l'immatériel. Le capitalisme en tant qu'il est "un fait social total", comme nous l'avons vu dans la partie précédente, exige d'ajuster l'ensemble des institutions de la société aux impératifs de l'économie de marché et à ses évolutions. C'est le sens du programme de "refondation de l'école" du Parti socialiste français aujourd'hui au pouvoir:"Inscrire le pays sur les trajectoires de croissance structurelle forte dans une économie de la connaissance internationale." ( Projet de loi, Assemblée nationale, 23 janvier 2013)
L'économie de marché, en se radicalisant,  est appelée à se se développer de plus en plus sous la forme d'une économie de la connaissance qui fait du patrimoine culturel de l'humanité la nouvelle source de gisements dans laquelle puise le capital pour réamorcer son processus d'accumulation, confirmant le pronostic de Clark Kerr qui prévoyait dès le milieu du XXème siècle, "que la culture doit tenir dans la seconde moitié de ce siècle le rôle moteur dans le développement de l'économie, qui fut celui de l'automobile dans sa première moitié, et des chemins de fer dans la seconde moitié du siècle précédent." ( Debord, La société du spectacle, 193) La radicalisation de l'enclosure de la nature dans le dernier tiers du XXème siècle va de paire avec l'enclenchement de ce que le juriste américain J. Boyle a appelé le deuxième grand mouvement d'enclosure, celui concernant la connaissance. Ce dernier terme n'est toutefois pas suffisant englobant; c'est pourquoi nous préférons parler ici d'immatériel. Par exemple la chanson populaire Happy birthday to you n'est pas, à proprement parler, une connaissance, mais une création immatérielle de la culture populaire; elle est désormais devenue, par un artifice juridique, la propriété intellectuelle et exclusive de A.O.L. Time Warner; ce qui fait qu'un cinéaste qui voudrait incruster dans son film une scène où des enfants la chantent  devrait, au préalable, verser à la compagnie de l'argent pour en faire usage. Autre exemple, le Film Batman forever  fût menacé d'interdiction car la batmobile, dans une scène du film, traverse une cour dessinée par un architecte qui réclamait des droits de propriété intellectuelle pour l'exploitation de l'image de son oeuvre. On comprend alors pourquoi le cinéaste A. Resnais a dû renoncer à son projet de monter un film exclusivement fait de scènes empruntés à l'histoire du cinéma:"Avec du temps et de la patience on y serait peut-être arrivé. Mais financièrement, ç'aurait été une entreprise folle." (cité par Stiegler, De la misère symbolique, p. 51) Il aurait fallu verser, pour chaque séquence du montage, de l'argent au titre des droits de propriété intellectuelle, ce qui, mis bout à bout, aurait représenté une somme considérable digne d'une superproduction hollywoodienne. Comme le relevait ironiquement, le réalisateur américain D. Guggenheim:"A un artiste de dix huit ans, je dirais qu'il est libre de faire ce qu'il veut, mais... Et là je lui donnerais la liste de toutes les choses qu'il ne pourrait inclure dans son film. Je lui dirais qu'il est totalement libre de réaliser un film dans une pièce vide avec deux copains." Et encore, il devra prendre bien soin de ne pas incruster des scènes faisant référence à des oeuvres sur lesquelles valent des droits de propriété intellectuelle comme telle ou telle chanson.
 La radicalisation de l'économie de marché touchant la sphère de l'immatériel  atteint aujourd'hui un degré tel que, de plus en plus, c'est la sphère politique elle-même qui y est intégrée. Les Etats  se gèrent comme des super entreprises qui cherchent à tirer profit de leurs "actifs immatériels", leur patrimoine culturel. Il s'agit de définir de nouvelles stratégies pour faire rentrer de l'argent dans les caisses de l'Etat dans une situation d'endettement endémique. La France devient une marque à vendre au même titre que Nike ou Coca Cola. Sous l'impulsion de l'Etat, on ouvre un peu partout dans le monde des succursales de musées comme le Louvre, le Guggenheim, le Pompidou ou d'universités comme la Sorbonne à Abu Dhabi, au pays des pétro dollars en faisant payer des droits d'inscription onéreux: voir l'organe officiel en charge de cette nouvelle stratégie, l'APIE, l'Agence du Patrimoine Immatériel de l'Etat.
La connaissance, dans ce champ de l'immatériel, constitue évidemment une gigantesque réserve à capter pour le capital; c'est ainsi que se développe aujourd'hui, partout dans le monde,  au titre d'une "nouvelle économie de la connaissance" dans le jargon des politiques libérales désigne un capitalisme cognitif, c'est-à-dire, un nouveau mode d'accumulation du capital, la transformation de l'argent en plus d'argent, par l'organisation artificielle d'une rareté de connaissance. Si les Etats Unis sont bien devenus "le miroir dans lequel nous pouvons regarder notre avenir", nous pouvons nous en faire une idée en observant que c'est là-bas que "cette tendance au tout brevet est la plus forte. On y brevète les logiciels, le vivant, mais aussi les méthodes d'affaires." (Latrive, Du bon usage de la piraterie, p. 143)  La contradiction qui semble insurmontable de cette nouvelle forme de capitalisme de l'immatériel, c'est d'exploiter des gisements culturels qui n'ont pu se constituer et qui ne peuvent se renouveler que parce qu'ils sont totalement étrangers à la logique économique du profit et de la rentabilité. Une vénérable institution, dont la fondation remonte au coeur du Moyen-Age, comme la Sorbonne, n' a acquis son prestige, c'est-dire, sa valeur, au cours des siècles, que parce qu'elle avait des motivations fondamentalement anti économiques qui relevaient des tâches supérieures de la culture, la quête du savoir, le développement de la pulsion d'exploration du monde, etc. En exploitant en vue du gain ces ressources culturelles, on voit mal comment le capitalisme pourrait ne pas les épuiser, comme il le fait pour les ressources de la nature. Plus encore, peut-on clôturer  la connaissance, et plus largement la culture et tout le patrimoine immatériel de l'humanité qui va avec, comme on clôture des terres? Traiter cette dernière question conduit au coeur de la crise actuelle qui affecte les catégories fondamentales du capitalisme et laisse planer un niveau élevé de scepticisme sur le bien fondé de la gestion libérale du problème comme nous allons le voir...


(1) Nul besoin de verser dans une vision complotiste du monde pour appuyer cette thèse. Autrefois, au Moyen Age, par exemple, l'idéologie dominante était celle que diffusait la classe dominante du Clergé par le biais institutionnel de l'éducation confessionnelle. Aller se confesser, signifiait, dès l'enfance, livrer son intimité à la hiérarchie cléricale qui pouvait ainsi cultiver, à, sa façon,  le jardin secret des gens. Il n'est plus question de cela aujourd'hui. L'institution la plus puissante, qui permet aux classes dominées d'intérioriser l'idéologie de la classe dominante, en dehors de l'école républicaine, est celle des M.M.C (Mass Médias Communication) Ce point mériterait à lui seul un ouvrage comme celui qu'y consacrent Chomsky et Herman dans La fabrication du consentement. Nous avons développés quelques lignes d'analyse pour traiter cette question dans les six parties successives des  contraintes invisibles qui pèsent sur la pensée.

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